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  Les temps anciens en pays betsileo

  
Les origines  

Les temps anciens en pays betsileo

Qu’on le dise “betsileo”, selon l’usage,
ou “besilao”, suivant certaines
revendications, nul ne conteste l’historicité du pays betsileo. Dans cette belle région des Hautes Terres, fragmentée par le relief en zones de plateaux, de bassins et de massifs montagneux, on reconnaît des limites quasi naturelles avec la falaise et la forêt tanala à l’est, le massif de l’Andringitra au sud et le quasi no man’s land des pénéplaines à l’ouest. Mais la limite nord fait
problème, car si l’Ankaratra aurait pu faire pendant à l’Andringitra, l’Andrantsay, à ses pieds, fut d’abord une principauté apparentée à la dynastie d’Alasora et forma plus tard, avec toute la région au nord de la Mania, le Vakinankaratra, sixième province d’Imerina, alors que de nombreux seigneurs andriamasinavalona y portaient encore, en 1840, des noms caractéristiques des princes betsileo. La langue elle-même n’offre guère d’appui. Le parler du Fisakana, au nord-est, est très proche du malgache classique et celui du Tsienimparihy, au sud, plus proche des parlers occidentaux.


Outre deux traditions royales transcrites au 19e siècle et reconnues comme donnant la “bonne” version de l’histoire du royaume d’Isandra, l’historien dispose de nombreuses traditions recueillies et publiées au 20e siècle. Mais ces “sources” sont en fait des formes de travaux historiques.
C’est ainsi que des informations recueillies pour les quelque 1 500 pages de sa volumineuse Monographie des Betsileo, le Père Dubois a tiré une sorte d’histoire générale. Hommes d’Eglise ou enseignants pour la plupart, les auteurs qui publièrent au 20e siècle, retouchèrent les textes de la tradition pour ne garder, comme écrit l’un d’eux, “que ce qui nous paraissait très clair et absolument vrai”. Les remaniements se firent évidemment en fonction du discours officiel sur l’histoire de Madagascar et du positivisme de l’enseignement de l’époque coloniale, cependant que le parti de ne retenir que “ce qui paraissait très clair et absolument vrai” a conduit au passage à éliminer ce qui correspondait à une formulation selon les anciens modèles culturels, notamment ceux qui étaient en rapport étroit avec la pensée religieuse. A utiliser avec précaution donc, ces traditions demeurent évidemment les indispensables clefs de l'Histoire.

Les peuples anciens

Comme dans les autres régions, l’histoire du pays betsileo rapporte, à une époque ancienne, l’existence de populations primitives. Mais elles sont, ici, bien antérieures aux Vazimba. Ce sont, disparus, les Fonoka et les Lakoka (ou Gola en Isandra), les Taimbalibaly et les Taindronirony en Lalangina, et, toujours présents en Arindrano comme groupe ancestral (foko), les Bongò.
On ne s’attardera pas sur les rapprochements qui firent des Fonoka des Fenikiana (“Phéniciens”) et des Gola des Gaulois ! Ni non plus sur l’interprétation du Père Dubois qui, pensant qu’il existait des “lois générales des grandes migrations de l’hémisphère austral”, voyait dans ces premières populations — sans nous expliquer comment ils auraient traversé le Canal de Mozambique — des “Nègres de type plus primitif” que les “Nègres de type plus mélangé” ou les “Négroïdes”, qui auraient été les ancêtres des Betsileo !
Que la mémoire ne se souvienne pas précisément des premiers établissements dans la région ne doit pas surprendre, quand on se rappelle que l’homme y avait déjà introduit et cultivé le chanvre et le ricin au 4e siècle avant l’ère chrétienne. Mais il est douteux que les premiers Malgaches aient strictement mangé cru, vécu dans des cavernes et soient normalement allés nus, bien que la majeure partie des traits les définissant proviennent bien du fonds culturel malgache.
Ainsi la condition des Taimbalimbaly, qui ne coiffaient pas leurs cheveux et étaient fort habiles à grimper aux arbres, était-elle plus qu’élémentaire — celle des sauvages, pensait-on, car c’est à peine s’ils savaient élever des poules et des zébus.
Ils ignoraient le travail de la forge et leurs outils n’étaient que de bois et de pierre. N’ayant ni chef ni roi, en cas de nécessité, ils élisaient l’un des plus forts et courageux d’entre eux pour les guider. Mais la guerre elle-même aurait utilisé des armes bien inoffensives et n’aurait visé que l’obtention de femmes à épouser, de zébus à élever et de pâturages pour les troupeaux. Les vaincus dans ces conflits n’étaient ni mis à mort, ni réduits en esclavage. Quant aux morts, on leur donnait les marais pour sépultures.
De fait, à cette époque où la forêt dominait encore dans les Hautes Terres, on peut penser que leur pratique des arbres correspondait ou à la collecte de produits destinés au commerce des simples ou à des rituels agraires que l’on peut reconstituer et même encore voir dans des circonstances particulières.
Qu’ils n’aient pas utilisé de fer dans leurs armes n’apparaît pas exceptionnel à l’époque envisagée — étant donnée la forme de rejet de ce métal -, ni exceptionnelles non plus les sépultures immergées qui longtemps furent celles des chefs et des personnes importantes.
Que ces faits de la culture ancienne aient pu être donnés comme marques de sauvagerie montre à l’évidence qu’ils en vinrent à ne plus être compris et qu’ils ne l’étaient plus quand fut élaborée cette tradition.

Le temps des Vazimba
L’ancienne présence des Vazimba est attestée par nombre de tombes (fasam-bazimba) et de terres qui leur sont consacrées (tanim-bazimba). Chaque village, en Isandra du moins, a sa tombe vazimba.
Quant aux terres, elles étaient encore nombreuses, il y a une vingtaine d’années, à rester inexploitées, ces tanim-bazimba s’étendant parfois sur tout un vallon qui restait en friche, malgré la pression démographique et les incitations des agents de développement.
Ce fut dans les années 1980 que l’attitude changea en certains terroirs, grâce aux ombiasy qui décidèrent des procédures de remise en culture, après avoir transféré sur la terre ferme les restes mortels du Vazimba qui y avait sa dernière demeure.
Dans la tradition betsileo, le temps des Vazimba est une grande époque où l’on situe, correspondant au temps de Rapeto dans le Nord, celui des géants du Betsileo avec Ravariona, dont le royaume, délimité par la marque de ses pieds dans le rocher, comprenait le Lalangina et l’Isandra au centre, le Vohibato et le Homatrazo au sud, et le Manandriana au nord : pratiquement tout le pays betsileo.
C’est au temps des Vazimba que la tradition situe l’afotroa, le grand feu — naturel pour beaucoup d'auteurs — qui a détruit la forêt préexistante. Une tradition l’appelle aussi afon’Andrianafotroa (le “feu d’Andrianafotroa”), du nom du roi vazimba qui l’aurait déclenché.
Quoi qu’il en soit, dans le bassin d’Ambalavao, les restes calcinés de ce grand feu remontent, en datation absolue, au 14e siècle. Ce siècle fut donc celui des grands défrichements dans la région, celui de l’essor de la riziculture irriguée et, bien sûr, celui de l’élevage que permettait la création de ces grands espaces de savane.
La riziculture était à la base de l’autorité et du pouvoir des Vazimba, car non seulement ils dirigeaient l’aménagement des rizières et leur irrigation, mais organisaient le calendrier rizicole.
Cette importance historique du riz est constamment soulignée par les textes. C’est ainsi qu’une tradition mémorisée par les Vazimba exilés dans l’Ouest, rapporte que leur différend avec les andriana d’Imerina avait eu pour cause certaines variétés de riz.
Les andriana leur en ayant demandé, ils leur avaient fourni les graines requises, mais les avaient auparavant passées au feu. Semées, elles ne germèrent ni ne poussèrent. Les andriana en demandèrent aux Vazimba du Betsileo qui, hospitaliers et serviables, leur en fournirent. C’est après la pousse de ces dernières que les andriana auraient compris la ruse des Vazimba d’Imerina et les auraient vaincus pour venger l’affront.
Dans la tradition betsileo, c’est à l’époque vazimba que les andriana auraient vu instaurer leurs droits. En effet, à la fin de l’afotroa, les animaux et de nombreux hommes s’étaient retrouvés au bord d’un grand marais. Les hommes s’étaient déjà partagés les animaux, quand arrivèrent les andriana.

Le royaume des Iarivo
Il leur fut attribué la terre et l’eau dont personne n’avait voulu. Il apparut, par la suite, que ce partage n’était pas sans conséquence : les maîtres de la terre interdirent, à défaut d’entente, aux maîtres des animaux “d’ensevelir leurs morts dans la terre, de faire passer leurs morts au dessus des rivières et de verser des larmes sur la terre en cas de décès de l’un des leurs”.
C’est ce qui fut à la base de la répartition des droits dans la société : “Les andriana, conclut la tradition, sont maîtres de la terre et le peuple maître des richesses — Ny andriana no tompon‚ny tany, ny vahoaka no tompon‚ny harena.”
La période vazimba se termine dans la guerre et le tumulte, laissant la place à une période heureuse, une “belle époque” (faha-soantany), et les Vazimba seraient partis dans l’Ouest, laissant la place au royaume des Iarivo qui les avaient chassés.
En fait, si la rupture est politiquement affirmée, tous les Vazimba ne quittèrent pas la région et le royaume des Iarivo que, d’après la tradition royale de l’Isandra, on peut dater de la fin du 15e ou du début du 16e siècle, s’inscrit dans la continuité.
Comme d’autres dynasties de la région qui, plus au nord, situent leurs origines aux sources de la Fanindrona ou à celles de la Mania, celle des Iarivo situe la sienne dans la partie haute d’un bassin hydrographique important et près d’un col qui permet la communication entre, d’une part, la région du gradin forestier et de la côte est et, d’autre part, les Hautes Terres déforestées.
Pour les Iarivo, ce fut, près du col de Vinanitelo, aux sources de la Matsiatra, à Andohavolanony — en cet endroit qui est donné pour celui du grand partage qui suivit l’afotroa — que se trouve le lieu à partir duquel une dynastie commença à rassembler des terres et des gens et étendit peu à peu son autorité sur la partie aval de la rivière et de ses affluents, qui sont au nombre des bases géographiques et idéologiques des fanjakana.
De la zone des plateaux où se trouvent les sources de la plupart des cours d’eau, le royaume des Iarivo étendit ainsi son autorité sur la zone des bassins dans laquelle la Mandranofotsy est un axe vital, avant de déborder sur la zone des massifs qui est à l’ouest. Quand elle donne la liste des huit premiers rois des Iarivo, la tradition s’ancre dans un monde à la fois vazimba et célestiel. En effet, les quatre premiers rois d’Andohavolanony — Andriantompo (“Prince maître”), Andrianaboabo (“Prince des hauteurs moyennes”), Andrianabolisa (“Prince Bolisa”) et Andrianàkatsàkatsa (“Prince de l’élévation” -, qui sont donnés pour vazimba, sont en fait les premiers dieux du panthéon betsileo.
Andriantompo est l’équivalent d’Andriamanitra (“Prince parfumé”) et d’Andriananahary (“Prince Dieu Soleil”) dans les autres régions. Selon le modèle andriana originel, les princes des Iarivo sont donc les descendants du Dieu du Ciel et Andohavolanony est assimilé au Ciel.
Ce n’est qu’à partir du cinquième roi, Andriandehibe (“Grand Prince”), que, pourrait-on dire, l’on se retrouve sur terre avec, près de l’actuel Alakamisy-Itenina, une capitale à Itenina qui domine la Mahàditra.
Au début du 17e siècle, le royaume d’Iarivo occupe une partie du Vohitsaomby et, dans la seconde moitié du siècle, va s’étendre sur l’ensemble des vallées de la Mango, de l’Iboaka, de l’Isaka, de la Mandranofotsy et du Volovandana ou Isandra, c’est-à-dire sur la zone à laquelle reste attaché le nom de Iarivo.
Les rois d’Iarivo créent d’autres villes comme Ialasora et déplacèrent leur résidence vers le nord dans une zone économiquement stratégique. Dans la seconde moitié du 17e siècle, le développement de l’insécurité conduisit les souverains à se réinstaller sur un site haut perché, celui d’Antsororoka qui domine l’Iboaka.
L’Iarivo, sur le futur territoire du Lalangina, est le pays des ancêtres de Ralambovitaony, qui va fonder le royaume d’Isandra, pièce centrale du monde betsileo du 18e siècle au milieu des principautés dirigées par les descendants de Ravelonandro, une princesse qui serait venue du pays antemoro.
Les Iarivo sont, tout à la fois, les sujets et les rois de l’Iarivo. Dans un contexte analogue qui est celui de la fin du monde vazimba, le mot qui, à la même époque, est utilisé en Imerina par Andrianjaka pour renommer Ialamanga et en faire Antaninarivo, connote un programme politique tenant compte des désirs du peuple en cette période cruciale.
Son utilisation à la fois en Imerina et en Ibetsileo indique bien que la Grande Ile n’était pas compartimentée en régions refermées sur elles-mêmes et sourdes à ce qui se produisait chez les voisins. Le système idéologique qui sous-tendait le fonctionnement des anciennes royautés et les problèmes que les cadres politiques avaient à résoudre dans des circonstances données, tout autant que la connaissance des solutions qui leur avaient été apportées dans des régions voisines, aboutissaient à des solutions voisines, même si les hommes, les individus qui tenaient les premiers rôles, étaient différents.
Dans le monde betsileo, le Royaume d’Iarivo s’inscrivait dans l’antique tradition politique malgache et allait léguer son héritage au royaume d’Isandra. Apparente, la rupture masque une profonde continuité. Les Vazimba ont légué au royaume d’Iarivo et, par son intermédiaire, au royaume d’Isandra, non seulement leurs dieux ou ancêtres divinisés, mais aussi l’ensemble de leurs pratiques politico-religieuses. Cela est vrai des différents rituels du culte des ancêtres, du traitement et du devenir de la dépouille mortelle des rois pour leur réincarnation en fanany, tout autant que des rites de fondation qui demandaient des sacrifices humains. L’apport des princes vazimba aux royautés ultérieures apparaît dès lors d’une importance considérable.


“Nager dans le brouillard”
Derrière la légende, l’histoire. C’est le cas de celle des Bongò qu’on raconte chez les Ontarae d’Amparatanjo, petit hameau de sommet du Tsienimparihy. A la suite d’une plaisanterie, le père de famille raconte l‚histoire (tantara) de la montagne (Bongo) qui se trouve à sept kilomètres de là.
Autrefois, dit-il, les gens n’avaient pas encore beaucoup de connaissances. C’était le temps où nombre de sommets étaient encore habités. Un jour où le brouillard était épais, les gens dirent : “Andao roaba hilomaño zavo — Allons nager dans le brouillard”.
L’un après l’autre, ils plongèrent dans le brouillard. Ceux qui étaient au sommet attendaient le retour de ceux qui avaient plongé, mais ils ne revinrent pas. Quand le brouillard se dissipa, on les vit morts au pied de la montagne. Et les gens qui virent le désastre de dire : “Heko ! Bongò tokoa ! — Vraiment ! ce sont des Bongò !” Depuis lors, bongò désigne les simples d’esprit.
La même histoire se dit de groupes d’ancestralité toujours bien présents dans le paysage social comme, par exemple, les Ikalatsara à une quinzaine de kilomètres au sud d’Ambositra. On raconte en effet que, par un petit matin brumeux, une mère de famille se précipita du haut d’une falaise, près du village.
Ne voyant pas sa femme revenir, le père dit : “Mahandry mirotra re Ikalatsara izany ! (Tena mahay mandaño amin‚ny zavona ! — Elle sait vraiment nager dans le brouillard !)”. Il incita ses enfants à en faire autant, puis, à son tour, sauta dans le vide. Le reste du groupe fut alors baptisé “Ikalatsara mandaño zavona”.
De même la connaît-on, en Imerina, pour les Zanakalondrano (“Enfants de l’onde marine”), qui vivaient autrefois à Antongona et dont certains sont établis à Anganomasina, près d’Alasora. Ils sont eux aussi présentés comme des gens très sots dans un monde très primitif — des gens à qui on ne reconnaissait guère que de savoir nager.
En fait, cette légende vise à déprécier de très anciens groupes gouvernants qui ont abandonné les sites sommitaux ainsi que leur pouvoir dans la société. Pour les dynasties postérieures, c’était une façon de condamner à l’oubli le dol infligé et de prévenir et éluder toute revendication ultérieure. Le mensonge prenait allure de “légende sacrée (angano masina)” qu’aucune des deux parties n’envisageait de remettre en cause.




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